La réalisation de l’attestation est complexe et échappe à toute procédure formelle.
Le document est connu des Français ; ses concepteurs, beaucoup moins. L’attestation de déplacement dérogatoire, à l’origine d’un cafouillage au sommet de l’État, samedi, après des railleries sur sa complexité, émane in fine de Matignon. Mais sa réalisation est plus complexe et échappe à toute procédure formelle.
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«Il n’y a pas de règle écrite», observe un haut gradé du cabinet de l’ex-chef du gouvernement Édouard Philippe. Saisie par l’urgence, lors du premier confinement, en mars 2020, la cheffe de cabinet du ministre de l’Intérieur a tenu la première la plume… en essayant de traduire l’attestation valable en Italie. «C’était la première fois, justifie un conseiller du gouvernement. Depuis, les choses ont évolué et se sont standardisées.»
«Mécanique interministérielle»
Le processus fait intervenir Matignon, le ministère de l’Intérieur et le Centre interministériel de crise (CIC), une instance stratégique activée le 17 mars 2020 face à la flambée de l’épidémie de Covid-19. Hébergée par Beauvau et dirigée par le préfet Renaud Vedel, elle est présidée dans les faits par le premier ministre. «C’est une mécanique très interministérielle», résume la porte-parole de Beauvau, Camille Chaize. «Le processus implique surtout le premier ministre et l’Intérieur», précise un conseiller de l’exécutif.
Première étape avant la publication du formulaire, un décret est pris par le chef du gouvernement et les principaux ministres concernés (Santé, Intérieur, Outre-mer), au terme d’une réunion du CIC et d’une «RIM», ces réunions interministérielles dont sont coutumiers les membres du gouvernement. Fondement juridique de l’attestation, ce texte ouvre la voie à la rédaction du formulaire à destination des Français.
Il y a vraiment le souci de penser les différents motifs et situations. Pour éviter les recours, il a fallu aller très vite.
Un rouage du gouvernement
Le document paru samedi matin a été conçu à la hâte, dans la nuit de vendredi à samedi: dès la fin du couvre-feu, à 6 heures, les quelque 21 millions d’habitants concernés par les nouvelles mesures devaient pouvoir le remplir. «Il y a vraiment le souci de penser les différents motifs et situations. Pour éviter les recours, il a fallu aller très vite», explique un rouage du gouvernement. Différentes versions ont circulé entre les services de Beauvau et de Matignon.
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De confinement en couvre-feu, la rédaction est subtile mais est devenue familière, les motifs de sortie étant généralement repris d’une attestation à l’autre – activité physique, achats de première nécessité, démarches administratives et juridiques… Pourtant, samedi matin, le formulaire diffusé a été présenté comme un symbole de la bureaucratie à la française, avec ses quinze motifs dérogatoires, ses astérisques, sa note de bas de page et ses trois limites kilométriques – jusqu’à 1, 10 et 30 kilomètres. Il a finalement été remanié, après l’agacement du chef de l’État devant la polémique naissante.
«Nous avons eu conscience très tôt que ce document était complexe, sa simplification était la bienvenue», explique la porte-parole du ministère de l’Intérieur. Preuve du rôle central de Matignon dans le processus, le communiqué annonçant la nouvelle version de l’attestation a été diffusé par les services du premier ministre.
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Presse, soignants, militaires: contrôles à la carte
La Direction générale de la police nationale (DGPN) a transmis aux policiers une « notice » pour les aider à réaliser leurs contrôles durant la crise sanitaire. Concernant les déplacements professionnels, elle précise que « la carte professionnelle des professionnels de santé, des agents de la fonction publique, des militaires et des élus, ainsi que la carte de presse, valent attestation permanente pour le trajet domicile-travail et les déplacements professionnels. Si vous êtes en possession de ce document lors de vos trajets domicile-travail, il doit être accompagné d’un titre d’identité en cas de contrôle par les forces de l’ordre. Aucun autre document ou justificatif ne vous sera alors demandé.»